Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Pierre à son four

   par Pierre Lesjean




A la ville comme à la campagne, beaucoup de maisons argonnaises s’articulent autour du four à pain. A ceux qui sont tentés de le restaurer pour le sauvegarder mais aussi pour l’utiliser, je livre mon expérience afin qu’ils ne subissent pas les quelques désagréments que j’ai eu à surmonter.
Le four que j’accompagne depuis maintenant 20 ans se situe à Alliancelles. Cette commune est très proche de l’Argonne, des similitudes de construction existent probablement entre ce four et ses voisins argonnais. Je suis intervenu trois fois sur ce four pour y entreprendre des travaux de restauration.

Vers 1985, sous l’impulsion d’un ami, Jean Yves Guinard, Meilleur ouvrier de France en boulangerie, j’entreprends de remettre ce four en état. Si la base de la cheminée, en pierre de Savonnière, est imposante, la voûte s’est aplatie au fil des ans, au point de s’effondrer et le fût de la cheminée initialement en brique de terre séchée ne passe plus la toiture. J’entreprends alors de remonter cette cheminée en briques rouges en respectant les proportions d’origine. La surface sur laquelle est cuit le pain, la sole semble en état. Derrière le four, au « cul du four », on peut observer le plancher de chêne sur lequel repose la sole constituée de carreaux de terre posés sur un lit d’argile. Je décide de refaire la voûte, fort abîmée par les infiltrations des eaux de pluie et prête à s’écrouler. Je la dépose, briquette après briquette et je la reconstruis quasi à l’identique en la moulant sur un tas de sable de forme arrondie. Je scelle à la chaux les briquettes de terre séchée. En fait, j’aurais pu les sceller directement à l’argile, le tout cuisant à la première montée en température.
Pendant une dizaine d’année, nous utilisons le four à raison d’environ 2 cuissons par an.

Vers 1995, le lendemain d’une cuisson, nous sommes inquiétés par la lente combustion du plancher de chêne sur lequel repose la sole, un morceau de plancher gros comme un plat est déjà tombé en braises au « cul du four ». A coup de jet d’eau nous éteignons le début d’incendie.
En recherchant la cause de ce feu, nous pensons alors que les infiltrations d’eau subies avant la restauration du toit ont causé une usure des joints entre les dalles de la sole permettant une infiltration lente des braises du feu de bois qui, cette fois-ci ont atteint le plancher de chêne. Ayant règlé les problèmes d’étanchéité de la toiture, je décide donc de refaire la sole. La voûte s’appuyant sur la périphérie du four, je démonte la sole et la reconstruit à l’identique en choisissant des poutres bien linéaires et sans mortaises. Les joints entre poutres sont comblés par de l’argile et la sole constituée de tommettes de terre cuite de 2 cm d’épaisseur repose sur un lit d’argile d’environ 5 cm d’épaisseur. Pendant 10 autres années, nous invitons les « copains » à venir partager le pain à la même fréquence d’environ 2 cuissons par an.

En 2005, le surlendemain d’une cuisson, un filet de fumée s’échappe d’une porte, c’est le nouveau plancher de chêne qui est en train de se consumer doucement. Cette fois-ci, les pompiers sont obligés d’intervenir pour démonter les poutres en braises et limiter le sinistre.
J’avoue avoir été tenté cette fois d’abandonner toute idée de restaurer ce four à pain, mais après maintes discussions et grâce au démontage judicieux des pompiers qui ont su préserver l’intégralité de la voûte du four, je décide de refaire la sole une fois de plus, mais cette fois en remplaçant le plancher de chêne par un voûtain de briques sur lequel je place des blocs de béton cellulaire de 15 cm d’épaisseur pour assurer l’isolation thermique du four. Les espaces entre les blocs sont noyés par un mélange de cendre et de poudre de chaux. L’absence de maçonnerie permet aux matériaux de se placer quand le four monte en température. Les briques de la sole plus épaisses (4cm) devraient augmenter l’inertie thermique et permettre une meilleure répartition de la température dans tout le four.

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