Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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LE REFUGE

(3ème partie)

   par André Theuriet



---------- Vraiment, demanda-t-elle avec une nuance d’attendrissement dans les yeux et un rien de coquetterie aux coins de la bouche, depuis votre retour, n’avez-vous jamais rencontré personne qui vous ait distrait de vos humeurs noires, qui vous ait redonné un peu d’intérêt à vivre ?
Il la regarda avec une expression de mélancolique gratitude :
---------- Si fait, soupira-t-il, le hasard a mis un soir sur mon chemin une enfant toute simple, toute naturelle, ayant le charme d’une plante sauvage, et j’ai senti que mon cœur se rajeunissait et se rafraîchissait auprès d’elle. Cette aimable fille, vous la connaissez Catherine ... et vous conviendrez qu’à mon âge je serais impardonnable, ridiculement présomptueux, de demander à cette jeunesse en bouton de prendre quelque intérêt au personnage maussade et fini que je suis ...
---------Elle baissait les yeux ; son cœur battait très fort sous sa frêle poitrine et au milieu de son trouble, elle le plaignait ; un mouvement de bonté la poussait à le rassurer et à le consoler.
---------- Il me semble, murmura-t-elle, que l’amitié ne dépend ni de l’âge ni du temps. Nous souffrons tous plus ou moins et c’est ce qui nous rend sympathiques aux souffrances des autres. Même une petite fille comme moi a ses peines et ses ennuis aussi bien qu’une grande personne.
---------- Des peines ? Vous ? s’écria-t-il incrédule.
---------Puis il se souvint des fâcheuses habitudes de M. de Louëssart et s’apitoya à son tour. Une lumineuse tendrese éclaira ses yeux bleus. Il se leva, prit les mains de la jeune fille et l’attirant doucement vers lui :
---------- Catherine, voulez-vous, malgré ma triste figure et ma barbe grise, être ma petite amie ?
---------Les longs cils bruns de Catherine frémirent imperceptiblement, puis de sa pure voix d’argent :
---------- OUI. Je veux bien, répondit-elle.
---------- Vous êtes une adorable fille ! dit-il très ému ; laissez-moi vous embrasser ...
---------Gentiment, chastement, elle lui tendit ses joues, puis, tandis qu’il y posait un baiser, elle-même, dans un mouvement irréfléchi de filiale effusion, effleura de ses lèvres fraîches le visage fané de M. de Lochères.
---------Vital, surpris, tressaillit délicieusement au contact inattendu et si timide de cette bouche d’enfant. Une soudaine chaleur lui monta à la gorge, comme un bouillonnement de sève, et, dans son trouble, il fit le geste de serrer Catherine dans ses bras. Mais la jeune fille s’était déjà rendu compte de l’incorrection de cette caresse étourdie ; une honte empourpra ses joues et elle retira vivement ses mains.
---------- Je vous en prie ! ... balbutia-t-elle, rentrons. Papa doit être éveillé et fort en souci de nous ...

A suivre ...


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Photo F. STUPP



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