VALMY, AN I DE LA REPUBLIQUE

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---------La liberté triomphe par-tout : guidée par la philofophie, elle parcourra l’univers, elle s’affeoira fur tous les trônes, après avoir écrafé le
defpotifme, après avoir éclairé les peuples. Les lois conftitutionnelles auxquelles vous allez travailler, feront la bafe du bonheur & de la fraternité des nations. Cette guerre-ci fera la dernière ; & les tyrans & les privilégiés, trompés dans leurs criminels calculs, feront les feules victimes de cette lutte du pouvoir arbitraire contre la raifon. L’armée dont la confiance de la nation m’avoit donné la conduite, a bien mérité de la patrie : réduite, lorfque je l’ai rejointe le 28 août, à dix-fept mille hommes, déforganifée par des traîtres que le châtiment & la honte pourfuivent partout, elle n’a été effrayée ni du nombre, ni de la difcipline, ni des menaces, ni de la barbarie, ni des premiers fuccès de quatre-vingt mille fatellites du defpotifme. Les défilés de la forêt d’Argonne ont été les Thermopyles où cette poignée de foldats de la liberté a
préfenté pendant quinze jours à cette formidable armée une réfiftance impofante. Plus heureux que les Spartiates, nous avons été fecourus par deux armées animées du même efprit que nous ; nous nous fommes rejoints dans le camp inexpugnable de Sainte-Menehould. Les ennemis, au défefpoir, ont voulu tenter une attaque, qui ajoute une victoire à la carrière militaire de mon collègue & ami Kellermann.
Dans le camp de Sainte-Menehould, les foldats de la liberté ont déployé d’autres vertus militaires, dans lefquelles le courage même peut être nuifible : la confiance en leurs chefs, l’obéiffance, la patience, & la perfévérence. Cette partie de l’empire français préfente un fol aride, fans eau & fans bois. Les Allemands s’en fouviendront ; leur fang impur fécondera peut-être cette terre ingrate qui en eft abreuvée. La faifon étoit très pluvieufe & très froide : nos foldats étoient mal habillés, fans paille pour fe coucher, fans couvertures, quelquefois deux jours fans pain, parce que la pofition de l’ennemi obligeoit les convois à de longs détours par des chemins de traverfe, très-mauvais en tout temps, & gâtés par les pluies continuelles ; car je dois rendre juftice aux régiffeurs des vivres & de fourrages, qui, malgré tous les obftacles des mauvais chemins, de la faifon pluvieufe, des mouvements imprévus, ou que j’étois obligé de cacher, ont entretenu l’abondance, autant qu’il leur a été poffible ; & je fuis bien-aife de publier que c’eft à leurs foins qu’on doit la bonne fanté du foldat. Jamais je ne les ai vu murmurer : les chants & la joie auroient fait prendre ce camp terrible pour un de ces camps de plaifance, où le luxe des rois rassembloit autrefois des automates enrégimentés, pour l’amufement de leurs maîtreffes ou de leurs enfants. L’efpoir de vaincre foutenoit les foldats de la liberté ; leurs fatigues, leurs privations ont été récompenfées : l’ennemi a fuccombé fous la faim, la mifère & et les maladies. Cette armée formidable fuit, diminuée de moitié.

---------Les cadavres & les chevaux morts jalonnent fa route. Kellermann les pourfuit avec plus de quarante mille hommes, pendant qu’avec un pareil nombre je marche au fecours du département du Nord & des malheureux & eftimables Belges & Liégeois.

---------NB : L’engagement révolutionnaire passionné de DUMOURIEZ peut faire sourire : six mois plus tard, il passait à l’ennemi en livrant les commissaires de la convention. Cette trahison ne lui fut jamais pardonnée. Ainsi, en 1814, les Bourbons ne l’autorisèrent pas à rentrer en France.

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