Etonnant, ce document d’archives que nous a envoyé Denis Marquet, qui fut longtemps instituteur à Verrières et qui, en retraite dans le midi, a toujours un pied en Argonne.
Nous sommes sous l’ancien régime, à 30 ans de la Révolution, et la décision d’engager une « sœur d’école » va être prise par une assemblée d’habitants. C’est le notaire royal qui réunit « les habitants dudit Verrières en la manière accoutumée ». Cela se passe dans l’église, “lieu accoutumé à tenir les assemblées des habitants .
Voici le début de l’acte : “Aujourd’hui vingt-deux juillet mil sept cent cinquante neuf, jour de dimanche, je, soussigné Florent Dommanget, notaire royal au bailliage de Sainte Ménehould, étant à Verrières en présence des témoins ci-après nommés en exécution de l’ordonnance de Monsieur Matthieu, conseiller du roi, lieutenant subdélégué en ladite ville de M. l’intendant de Champagne
Le notaire écrira encore : “J’ai trouvé les habitants assemblés audit lieu, en laquelle assemblée étaient François Arnould syndic, Claude Buirette lieutenant en la justice et Jean Joseph Mouton greffier
Cette assemblée a été convoquée pas François Arnould syndic “qui nous a certifié avoir convoqué la présente assemblée le jour d’hier de pot en pot et présentement au son de la cloche en la manière accoutumée
Suivent sur l’acte les noms des habitants, parmi lesquels on retrouvera des noms encore connus aujourd’hui : Nicolas Mouton, bourgeois, Pierre Cappy, Henri Hussenet, Nicolas Jacquot, laboureurs, Pierre Camus, Louis Buirette, Pierre Pérignon (comme Dom Pérignon) manouvriers.
L’annotation du métier de chaque participant à l’assemblée nous donne aussi des renseignements sur la vie au village. On trouvera, outre les métiers déjà cités, le tailleur Jean Galichet, le boucher Hubert Vallier, le charbonnier Jean Laflotte, le tisserand Claude Bourguet, le marchand Nicolas Simon, les meuniers Jacques Bourcon et Jean Seingeot
Trois habitants voteront contre mais “tous les autres habitants ont dit qu’ils estiment que l’établissement d’une sœur d’école pour les filles est utile et avantageux. La décision est donc prise à la « pluralité des voix » et c’est Marie Persenet, fille majeure, qui sera reçue pour “tenir les écoles de filles pendant toute l’année pour les apprendre à lire, à écrire, prier Dieu, le catéchisme et les élever en la religion catholique, apostolique et romaine
Sont précisés aussi les horaires de l’école : “l’été depuis six heures du matin jusqu’à onze et depuis une heure de relevée jusqu’à six et en hiver depuis sept heures du matin jusqu’à 11 h et depuis une heure de relevée jusqu’à cinq Ce qui ferait 11 heures de classe en été et 9 heures en hiver sachant que l’école des filles est séparée de celle des garçons.
La suite de l’acte précise le travail de cette sœur d’école : “Elle sera tenue d’assister fêtes et dimanches à la prière du rosaire et aux instructions de la paroisse au moyen de quoi ladite sœur d’école sera exemptée de loger des gens de guerre, de taille (impôt) et autres charges de la communauté .
Un logement convenable sera fourni à la sœur d’école, et le loyer sera payé des deniers communs par le syndic en exercice.
Mais ce qui est étonnant, ce sont les lignes concernant le paiement : “Il lui sera payé pour chaque mois pour chaque fille qui sera envoyée à son école : à savoir cinq sols pour celles qui n’écrivent pas et six sols pour celles qui écrivent L’école n’était pas encore obligatoire
Denis Marquet nous donne ses sources : acte notarié passé devant Me Dommanget. Archives Départementales de la Marne 4E G19.
Denis Marquet, adaptation John Jussy.