Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Le partage des biens communaux de Minaucourt.

(1793-1813)

   par Bernard Janson



Pourquoi une telle erreur grossière commise par le maire ? Minaucourt vivait à cette date des heures enfiévrées. La commune avait été assez gravement sinistrée lors de la bataille de Valmy. Ses pertes se montaient à 98 467 livres. Les premiers secours n’avaient été que de 20 093 livres. Les habitants s’attendaient à être indemnisés intégralement comme l’avait promis la Convention. Le 8 floréal (27 avril), la commune avait reçu la visite de deux commissaires du Conseil Exécutif Provisoire, Cosme Hébert et Pierre Leplanquais, qui venaient, non pas payer le solde des pertes, mais au contraire, opérer une évaluation estimative des dommages de guerre. Une véritable émeute avait éclaté, et les commissaires avaient dû s’enfuir. Le district de Montaigne sur Aisne (Sainte-Ménehould) avait réagi avec vigueur et les meneurs, Gérard Dieu, Pierre Galichet, ainsi que le maire Claude Champenois, à qui l’on reprochait son manque de rigueur, avaient été arrêtés le 14 floréal suivant (3 mai).
On s’étonne donc moins des erreurs de rédactions des actes de partage. Aucune observation n’ayant été formulée par le district, les habitants sont absolument convaincus de la validité du partage et jouissent paisiblement d leurs parts, ceci depuis huit ans (1801-1809).
En l’an X, le maire Camus, réclame au Préfet de la Marne, la remise en commun des pré-marais pour y apporter des améliorations, et les louer au profit de la commune. Ses motifs ? : il n’existe aucune pièce concernant le partage, le procès-verbal du 25 floréal an II, seul enregistré, n’établit qu’une division en lots et l’acte de partage du 30 germinal est sujet à caution. Il ajoute que du fait du mauvais entretien des fossés par les propriétaires, les prés sont dans un piteux état.
Ces raisons bien minces suffisent au Préfet pour déclarer par arrêté du 17 ventôse an X (8 mars 1802) la nullité du partage et remet les biens contestés à la commune. Un second arrêté du 4 prairial (24 mai) autorise d’adjudication de la récolte de l’an X des prés communaux.
Mais les propriétaires dépouillés ne l’entendirent pas de cette oreille. Ils amenèrent à leurs vues le sous-préfet de Sainte-Ménehould, Jean-Baptiste Drouet, qui, se jugeant sans doute mieux informé que le Préfet, révoqua l’autorisation préfectorale d’adjudication du 4 prairial. La situation était donc la suivante : le partage était annulé, les biens contestés remis à la commune de Minaucourt, mais comme aucune adjudication n’avait pu avoir lieu, les anciens propriétaires gardaient la possession de leurs lots.
L’année suivante, lorsque les foins furent en état d’être coupés (avril-mai 1803), le maire effectua auprès du Préfet une nouvelle démarche. Le 4 prairial an XI (24 mai 1803) un nouvel et impératif arrêté du Préfet ordonne l’adjudication de la récolte des biens communaux. Dieu, arpenteur à Virginy dresse le 12 messidor (1er juillet) procès-verbal de l’arpentage et de la division des lots à louer.
Le 15 messidor (4 juillet), J.B. Drouet qui montre dans cette affaire des preuves de sympathie pour les « frustrés » avertit par affiche les habitants de Minaucourt que l’adjudication des communaux pour l’an XI aura lieu le 22 messidor suivant. Entre temps, certains habitants avaient adressé au Préfet une pétition demandant à être maintenus en possession des biens communaux. Ce dernier informe Drouet et en profite pour admonester très sévèrement son subordonné de sa décision illégale du 25 prairial an X.

Drouet se rend donc à Minaucourt le 22 messidor pour présider l’adjudication. En début de séance, Michel, huissier à Sainte-Ménehould, remet au Sous-Préfet un acte d’opposition de la part de Jacques Dez, adjoint au maire, Claude Champenois, Jean Noailles, Jacques Claude Lebon et Nicolas Galichet, agriculteurs. Ils font valoir que les usages ont été partagés selon la Loi. Le Sous-préfet, heureux de cette nouvelle tournure, arrête immédiatement qu’il sera sursis durant dix jours à l’adjudication.
Le Préfet maintient fermement sont point de vue. Le 26 messidor (15 juillet) par un arrêté aux termes énergiques, il confirme ses décisions de l’an X, déclare nulle la décision du Sous-préfet du 22 messidor et décide de refaire procéder à l’adjudication.
L’année suivante, le 5 prairial an XII (25 ami 1804), J. B. Drouet revient à Minaucourt président l’adjudication des foins. En début de séance, l’huissier François lui remet une nouvelle imposition de Jacques Couard, manouvrier à Minaucourt. Elle est basée sur le Loi du 9 ventose an XII renvoyant aux Conseils de Préfecture les différents relatifs aux partage des biens communaux. J.B. Drouet, après examen, rejette l’opposition juridiquement nulle à son point de vue “attendu que le partage des usages étoit annullé par l’autorité supérieur avant la promulgation de la loi qui ne peut avoir d’effet rétroactifs L’adjudication se fait et produit la somme de 656 F. Mais de nombreuses réclamations se font jour et le Préfet, embarrassé quant à la ligne à suivre, en avise le 12 thermidor (1er août) le Ministre de l’intérieur. Celui-ci demande de plus amples renseignements mais aussi enjoignant de prendre une décision ferme et de l’en aviser. Cette réponse dilatoire n’enchante pas le Préfet qui prend le parti d’attendre. Aucune suite ne sera donnée à cet ordre dans l’immédiat.

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