La sous-préfecture de Sainte-Ménehould agonise. C’est le moment de se plonger dans son passé et rappeler comment elle a pérégriné dans notre cité.
Provinces, Duchés et Comtés sombrant dans le passé, les conseillers de Louis XVI lui proposèrent d’adopter une nouvelle division du territoire royal. L’idée fut reprise et mise en œuvre par la Révolution. Un décret du 22 septembre1789 partage la France en 83 départements divisés en districts, cantons et communes. Il faut attendre le consulat pour que les départements adoptent la configuration actuelle avec des arrondissements. Bonaparte souhaite déconcentrer le pouvoir central. Il le confie au préfet pour le département et aux sous-préfets pour les arrondissements afin d’exercer une tutelle sur les assemblées élues. Ce sera fait le 17 février 1780 et Sainte-Ménehould sera sous-préfecture dotée d’un sous-préfet.
Les sous-préfectures de Drouet :
Drouet qui bénéficie d’une grande notoriété et d’un passé politique riche espère être préfet de la Marne. Bonaparte se méfie des Jacobins et Drouet n’héritera que de la sous-préfecture de Sainte-Ménehould et sera sous l’autorité d’un noble, préfet de la Marne, Bourgeois de Jessaint.
La création précipitée des sous-préfectures n’a pas permis de prévoir un lieu pour abriter cette nouvelle administration. C’est donc à son domicile, situé rue de la grande Auche (actuellement rue Chanzy n°78), que le sous-préfet s’installe. Cinq ans plus tard, le département acquiert un hôtel particulier sur la place d’Armes (actuellement n°21 place d’Austerlitz) qui, depuis quelque temps reprend des couleurs après avoir été délaissé durant quelques années. Il bénéficie d’une restauration de grande qualité pour devenir une maison médicale.
Des plaques indiquant que ces deux immeubles ont été des « sous-préfectures » sont apposées sur les façades.
La sous-préfecture se déplace vers l’Hôtel de ville :
Je dois avouer que je ne sais trop comment a eu lieu cette migration. Les lecteurs éclaireront peut-être ma lanterne. Toujours est-il qu’en fin de XIXème siècle, on retrouve la sous-préfecture au n°11 de la place de l’hôtel de ville, dans un imposant édifice à la décoration étonnante. Cette maison avait été construite par Monsieur Bournizet, tanneur en centre ville, sur les bords de l’Aisne. Plus tard la poste s’installera dans ces murs. Elle y demeure encore aujourd’hui.
L’heure des économies :
En 1926, le président Doumergue appelle au poste de Président du conseil Raymond Poincaré, homme d’expérience qui constitue un gouvernement d’union nationale. L’heure est au redressement des finances publiques. Des décrets-lois en vue d’alléger le budget de l’état suppriment les sous-préfectures par centaines. Sainte-Ménehould passe à la trappe. Ses locaux seront alloués à la Poste qui quitte ses locaux du n°4 place de l’hôtel de ville.
La renaissance due aux Allemands :
En 1940, l’occupant souhaite que le gouvernement français de Laval soit représenté dans cette zone sensible. Une sous-préfecture est rétablie par la loi du 13 septembre 1940 au n°1 de la place de l’hôtel de ville, à l’angle de la rue Drouet. Le premier sous-préfet sera étonnamment Gaston Vatier, le maire de Sainte-Ménehould.
Pour peu de temps car en novembre 1940 il est remplacé par un dénommé Legros. A la libération elle reste sur place.
Elle prend ses aises :
Le 1er décembre 1954, les services de la sous-préfecture s’installent dans un bâtiment imposant au rond-point de l’avenue de la gare. Construit à la fin du XIXème siècle, en même temps que les casernes du quartier Valmy, cette « villa » abritait l’état major des cuirassiers. Les cuirassiers partis après la première guerre mondiale, l’édifice fut acheté M. Besancenot, marchand de vin, puis cédé à M. Jeanniard qui en fit un hôtel prospère, le « Modern Hôtel ». Durant l’occupation ce fut le siège de la Kommandantur. Lors de leur fuite, les Allemands mirent le feu au bâtiment qui fut gravement endommagé. A la libération il est acheté et reconstruit par le département pour y implanter la sous-préfecture et d’autres administrations. La demeure est austère et le département souhaite offrir à l’état un écrin plus prestigieux.
La maison Autier : le goût du luxe :
Il s’intéresse à « La maison Autier » qui appartenait à un riche bourgeois ménéhildien. Faute de descendants intéressés elle est en vente. C’est une très belle propriété située place de l’hôtel de ville au coin de la rue Philippe de la Force, reconstruite après la guerre en harmonie avec l’architecture traditionnelle de la ville. L’achat est conclu en 1976 et commencent alors les travaux qui en feront une des demeures les plus luxueuses de la ville. En 1979, le sous-préfet Laigroz s’installe dans les lieux. Lui succéderont de nombreux sous-préfets qui ne s’éterniseront pas dans un poste de début ou de fin de carrière.
Aujourd’hui, dans la maison sans sous-préfets, ne subsiste qu’un service aux attributions limitées. L’agonie dure mais elle est inéluctable.
François Duboisy